Le billet d’Alex : Deandre Ayton, les Blazers ont récupéré un des meilleurs pivots de la ligue
Le 01 oct. 2023 à 21:37 par Alexandre Martin

Une tonne de regrets et une tonne d’espoirs. Ça fait deux tonnes. Deux tonnes de raisons de parler de Deandre Ayton. En bien, en mal, en Arizona et désormais en Oregon. Ce mercredi, les Suns ont pris part au trade entre Bucks et Blazers permettant aux premiers cités de récupérer Damian Lillard. Les Cactus n’ont pas hésité à jouer les facilitateurs en envoyant leur pivot bahaméen à Portland alors que la contrepartie obtenue est loin de faire rêver. Pourquoi ce choix côté Phoenix ? Rip City, qui enflamme le marché des transferts depuis quelques jours, sera-t-elle le théâtre du vrai envol d’Ayton ?
Des regrets
Cinq ans après l’avoir choisi en premier choix de la Draft 2018, les Suns ont fait un autre choix : celui de se séparer de leur intérieur. Le fait que la contrepartie soit, comme indiqué en introduction, faiblarde n’est pas une si grosse surprise même si elle est décevante pour les fans des Suns. Elle est avant tout le signe que le front office des Cactus ne voulait vraiment pas compter Ayton parmi eux à la reprise. Un vent nouveau souffle sur Phoenix depuis plusieurs mois, une tornade appelée Ishbia. Monty Williams est parti, Chris Paul aussi et l’ami Deandre n’était plus dans les plans des dirigeants. C’était le cas depuis la fin précipitée du parcours des Suns lors des Playoffs 2022. La sortie de route en demi-finale de conférence contre les Mavs n’est pas du tout imputable au seul Ayton, loin de là. Mais il a été un gros sujet de discussion à Phoenix dans les semaines et les mois qui ont suivi. Sa relation inexistante ou presque avec coach Monty, sa préférence pour les jeux vidéo au détriment du repos, son côté soft sur certaines phases de jeu, son manque apparent de motivation… Ayton a subi une bonne dose de critique, la plupart venant d’Arizona. Il y a fort à parier qu’il n’aurait jamais obtenu une aussi grosse extension de contrat de la part des Suns si les Pacers n’étaient pas venus déposer leur offre de contrat en juillet 2022. Une extension qui était assortie d’une impossibilité pour Phoenix d’inclure son pivot dans un échange avant le 15 janvier suivant. Une manière de repousser l’inévitable effritement d’une relation qui n’a cessé de s’abîmer ces deux dernières années.
À la dernière trade deadline, les Suns se sont distingués sur le marché des transferts mais pas autour d’Ayton. Kevin Durant a débarqué en ville. L’expérience n’a pas donné les fruits escomptés. En tout cas pas pour l’instant. Les Playoffs 2023 ont montré que les Cactus n’étaient pas prêts, qu’il leur fallait encore du temps et un vrai équilibre d’équipe pour pouvoir rivaliser avec les meilleurs, les Nuggets en l’occurrence. Quand les Suns ont remporté le match 3 de la série face aux futurs champions du monde des États-Unis, un fait a retenu l’attention de tous les observateurs au-delà des 47 points de Devin Booker : Ayton était sur le banc dans le moneytime ! Cet épisode, suivi de l’élimination des Suns, fut clairement le point de non-retour pour le joueur comme pour la franchise d’Arizona
Car, loin de s’arrêter en (si bon ?) chemin, le management de Phoenix a continué son travail de recrutement. En juin, Bradley Beal a été récupéré en échange de Chris Paul, Landry Shamet et une poignée d’assets de Draft. L’effectif paraissait alors bien trop juste en termes de profondeur pour espérer quoi que ce soit malgré le talent affiché par le nouveau. Qu’à cela ne tienne, le front office a passé son mois de juillet à signer une pelletée de joueurs à coup de contrats minimum. Eric Gordon, Josh Okogie, Keita Bates-Diop, Damion Lee, Drew Eubanks, Chimezie Metu, Yuta Watanabe, Bol Bol… On peut parler de maximiser ses minimums. Mais un move était encore dans les tuyaux.
L’idée pour les Suns était désormais d’utiliser le contrat d’Ayton comme un asset capable de ramener plusieurs joueurs en échange afin d’épaissir la rotation autour du trio Booker – Durant – Beal. C’est chose faite ! Apparemment, les Suns étaient d’accord depuis un moment pour envoyer Ayton à Portland contre Jusuf Nurkic, Nassir Little et Keon Johnson. Il leur fallait juste une pièce sympa en plus dans le deal. Quand les Bucks ont mis Grayson Allen sur la table, l’opération a été très vite validée. Quatre joueurs contre un joueur. Numériquement, c’est ce genre de transfert que les Suns cherchaient même si on doute que ces quatre joueurs ne se rendent utiles à Phoenix. C’est de là que vient la déception côté fans des Suns, de cette sensation d’y perdre niveau talent. Pas une sensation d’ailleurs, une certitude. Les Suns avaient besoin d’autre chose. Ils verront plus tard pour l’organisation défensive autour de Jusuf Nurkic. Deandre Ayton avait, lui aussi, besoin d’autre chose que les Blazers pensent pouvoir lui fournir : le bon cadre pour un nouveau départ.
De l’espoir
L’espoir qu’Ayton a suscité à un moment chez les Suns est sans nul doute celui qui anime les Blazers au moment d’accueillir leur nouveau pivot et de construire l’après Lillard. Dans l’échange avec les Bucks et les Suns, Portland a également reçu Jrue Holiday mais le champion NBA 2021 n’a pas eu le temps de visiter l’Oregon puisqu’il a très vite pris la direction de Boston pendant que Robert Williams, Malcolm Brogdon et des tours de Draft faisaient le trajet inverse. Brogdon ne devrait pas rester de ce que l’on comprend. Les Blazers veulent faire confiance et donner un maximum d’espace à leur trio de jeunes arrières : Anfernee Simons, Shaedon Sharpe et Scoot Henderson. Côté intérieurs, l’arrivée de Robert Williams va venir renforcer une rotation qui devrait se faire à trois entre l’ex Celtic, Jerami et Deandre Ayton donc. Ce dernier n’a pas trop de souci à se faire sur son temps de jeu vu ses qualités et la régularité avec laquelle il est capable de produire des deux côtés du terrain. Il représente un double-double points / rebonds assuré dès lors qu’il a lacé ses sneakers. Il vaut au moins 16 ou 17 points et 10 rebonds de moyenne chaque soir si tant est qu’on le laisse gambader sur le parquet une petite trentaine de minutes. Il sort d’ailleurs d’une saison régulière de 67 matchs à 18 points de moyenne à 59% au tir accompagnés de 10 rebonds. En temps normal, le transfert par un prétendant au titre d’un tel joueur est une très grosse information. Dans le cas présent, cela a été (logiquement) relégué au second plan, l’annonce de Lillard aux Bucks trustant toutes les lumières.
Vu son caractère, plutôt discret, Deandre Ayton préfère sûrement cette situation. Il est arrivé tranquillement hier à Portland où il a été accueilli par Joe Cronin et plusieurs de ses nouveaux partenaires. À Phoenix, les Suns avaient besoin qu’Ayton propose moins que ce que son talent peut lui permettre d’apporter. Sur la saison qui arrive, il aurait été la quatrième option offensive derrière Devin Booker, Bradley Beal et Kevin Durant. À Portland, Ayton va être bien plus utilisé en attaque même s’il y a déjà plusieurs joueurs qui ont également besoin de s’exprimer offensivement. Simons a montré depuis 18 mois, Sharpe a fait rêver en fin de saison dernière et Scoot vient d’être drafté en troisième position. Ces trois arrières, les trois S, vont devoir trouver le moyen d’exploiter la palette de leur pivot. S’ils le font, ils ne le regretteront pas. C’est aussi et surtout un défi qui incombe à Chauncey Billups et son staff : trouver le bon équilibre pour voir tous ces talents s’épanouir.
Les Blazers vont poser un œil nouveau sur Ayton. Ils pensent avoir récupéré un des meilleurs pivots de la ligue. Sur le papier, c’est indéniable. À eux de faire en sorte que ce soit le cas sur le terrain en mettant Ayton dans les bonnes conditions, mentales principalement. S’ils y parviennent et que Deandre peut enfin réaliser tout son potentiel et dominer, les Blazers auront réussi un très gros coup alors qu’ils viennent de perdre l’un des meilleurs joueurs de leur histoire. Défensivement, Ayton peut devenir le pilier dont les Blazers ont besoin. Sa longueur, son appétence pour les rebonds, son sens du placement, sa mobilité font de lui un pivot parmi les meilleurs en défense dans la ligue actuelle tout en étant un attaquant efficace près du cercle, à mi-distance et au lancer-franc. Combien de pivots peuvent se targuer d’être clairement meilleur qu’un Deandre Ayton qui serait bien dans sa peau ? Le trio Nikola Jokic, Joel Embiid et Bam Adebayo bien sûr, mais ensuite ? Domantas Sabonis ? Oui vont nous dire les fans des Kings et on les comprend. Les derniers Playoffs et le niveau défensif du Lituanien peuvent autoriser ceux des Blazers à poser la question. Rudy Gobert ? Pas en attaque déjà. Kristaps Porzingis ? Est-il un pivot ? Brook Lopez ? Peut-être mais il a 10 ans de plus. Jarrett Allen ? Mitchell Robinson ?
L’espoir est grand pour le joueur comme pour la franchise. C’est ça qui va rendre cette nouvelle aventure encore plus passionnante à suivre. Jeunesse, talent, espoir et nouveau départ : Deandre Ayton va faire partie intégrante d’un projet excitant chez les Blazers. Un projet dont il peut devenir une des clés, le véritable point de pivot…