Warriors 2014/15 – 10 ans plus tard : Strength in Numbers, une mentalité de champion
Le 19 avr. 2025 à 15:38 par Alexandre Taupin

Attention au coup de vieux : la dynastie Warriors a gagné son premier titre il y a… dix ans ! Une épopée qui a marqué le début d’une révolution en NBA, notamment sur le plan du jeu. La bande de Stephen Curry était encore jeune, mais a réussi à emporter avec elle une grande majorité de fans de basketball. 10 ans plus tard, TrashTalk vous propose une série retraçant cette aventure singulière. Épisode 7 : Golden State, et la création d’un effectif aussi qualitatif que profond.
Quand on pense au titre des Warriors en 2015, une infinité de belles histoires nous viennent. La saison MVP de Stephen Curry, les explosions de Klay Thompson et Draymond Green, le retour en grâce de Shaun Livingston, le baptême réussi de Steve Kerr sur le banc et, bien sûr, un Andre Iguodala qui vient rafler le titre de MVP des Finales.
Mais pour comprendre ce titre de champion, il faut parfois remonter en arrière pour comprendre comment toute la structure s’est construite. Quelles pièces il a fallu bouger pour obtenir la meilleure complémentarité et la meilleure osmose au sein du vestiaire. Comment mettre en avant les qualités de chacun et faire en sorte que tout le monde tire le wagon dans la même direction ? C’est ce qui va nous intéresser aujourd’hui à travers plusieurs moments capitaux dans l’obtention de ce titre.
L’échange Monta Ellis – Andrew Bogut, l’acte fondateur
Pour expliquer le titre de 2015 des Warriors, il faut remonter au-delà même de la saison en question. En l’occurrence, en mars 2012. Les Bucks et les Warriors réalisent alors un transfert qui va beaucoup faire parler. Principale arme offensive des Warriors, Monta Ellis est en effet envoyé dans le Wisconsin en échange d’Andrew Bogut.
Un trade qui va profondément déplaire à la fanbase des Dubs. Andrew Bogut n’a pourtant pas démérité sur son début de carrière et il incarne le pivot défensif qui manque aux Warriors. Le problème, c’est qu’il est réputé fragile et, au moment du transfert, il est encore blessé et ne jouera pas la fin de saison. Et en échange, Golden State a dû sacrifier Monta Ellis, le meilleur scoreur de l’équipe et un joueur avec des stats de All-Star.
Un trade tellement mal vécu que les fans vont jusqu’à huer Joe Lacob, le propriétaire des Warriors, lors du retrait de maillot de Chris Mullin !
Un échange mal vu à ses débuts mais qui va pourtant vite porter ses fruits. Outre l’apport de Bogut en défense et dans la raquette, le départ de Monta Ellis va permettre de pleinement responsabiliser Stephen Curry en attaque. Les profils du Chef et d’Ellis étaient trop proches et la présence du vétéran limitait l’impact de son meneur. Celui-ci, une fois débarrassé de ses problèmes de cheville, verra ses stats exploser dès la saison suivante, passant de 15 à 23 points de moyenne. Monta Ellis parti, la place de titulaire au poste 2 a aussi été libérée et offerte à un certain.. Klay Thompson. Bien plus complémentaire de Steph, Klay pris ainsi son envol, stabilisant par la même occasion le backcourt avec, outre sa qualité de shoot, un profil défensif bien plus intéressant que ce que pouvait apporter Ellis. Les Splash Brothers étaient nés.
La blessure de David Lee, un mal… pour un bien
Au moment de la prise de fonction de Steve Kerr en 2014, les Warriors s’appuient sur un Stephen Curry en plein envol et nouveau All-Star, un Klay Thompson qui progresse rapidement mais aussi.. David Lee. L’intérieur, passé avant par New York, est une des têtes d’affiche à Golden State. C’est un double All-Star, dont une fois en 2013, une machine à double-double, un vrai scoreur dans la raquette et un titulaire en puissance pour les Dubs.
Mais le destin réserve une mauvaise surprise à Lee. Le joueur aggrave une blessure à l’ischio-jambier dès la reprise de la saison et doit manquer 25 matchs. Pour le remplacer, Steve Kerr opte pour Draymond Green. À l’époque, le pitbull sort de deux premières saisons plutôt discrètes à Oakland mais ce coup du sort va lui permettre d’exploser aux yeux du grand public. Propulsé titulaire, il s’intègre royalement au style de jeu prôné par son coach. C’est simple, Dray est à-peu-près l’antithèse de David Lee.
Lee est un intérieur à l’ancienne, attiré par le jeu à l’intérieur, incapable de shooter de loin et qui défend mal. Draymond Green, de son côté, est un excellent défenseur, un facilitateur et même s’il est irrégulier, il peut shooter de loin. Le fit est parfait avec l’envie de spacing et le jeu en mouvement voulus par Steve Kerr. La mayonnaise prend tellement bien que Golden State remporte 22 de ses 25 premiers matchs de la saison !
À son retour de blessure, David Lee ne peut que constater que sa place a été prise et il devient remplaçant. Si certains auraient pu faire la gueule ou plomber l’ambiance du vestiaire, Lee se montre exemplaire malgré sa chute dans la hiérarchie. Joueur apprécié partout où il est passé, il met l’équipe en premier.
Pour Steve Kerr, c’est un problème de riche qui s’offre à lui. Avec Draymond Green en général défensif et parfait glue guy dans le cinq, il récupère un double All-Star pour renforcer son banc. Et quel banc !
Outre Lee, le coach des Warriors peut compter sur Andre Iguodala (on y reviendra) mais aussi Shaun Livingston. Celui qui avait connu une horrible blessure au genou à la fin des années 2000 retrouve la lumière dans un rôle de meneur gestionnaire – défensif en relai de Stephen Curry. Le solide Mo Speights, mais aussi Leandro Barbosa, Festus Ezeli et le jeune Justin Holiday complètent ce qui est alors l’un des meilleurs bancs de la Ligue. Une seconde unit qui jouera un grand rôle dans l’acquisition du titre, avec évidemment le rôle de facteur X d’Andre Iguodala lors des Finales NBA.
Andre Iguodala, le sacrifié récompensé
Transition parfaite pour parler de ce cher Iggy. S’il n’est pas celui qui a balancé les plus grosses stats sur cette saison 2014-15, Andre Iguodala a assurément joué un rôle XXXL dans le titre remporté par les Dubs.
Le moment fort arrive durant la présaison, Steve Kerr décide qu’Andre Iguodala jouera en sortie de banc au profil d’Harrison Barnes. Le premier est un All-Star, un médaillé olympique et clairement un joueur plus accompli que le second mais le choix est avant tout tactique. Barnes n’a pas réussi à se faire une place en tant que sixième homme sous Mark Jackson, il brille davantage aux côtés des titulaires. Andre Iguodala, avec son expérience, accepte de se mettre au service de l’équipe et il continue de se montrer essentiel, cette fois dans un rôle de remplaçant.
Ce move de la part de Kerr a une répercussion énorme chez les Warriors. Plus encore que l’équilibre du groupe entre titulaires et remplaçants, le sacrifice d’Iggy est le symbole même de cette mentalité “team-first” que le coach veut mettre en place à Golden State.
« Il a été un élément fondamental de ce qui a été l’une des plus grandes saisons de l’histoire de la NBA. A bien des égards, Andre a donné le ton en acceptant de sortir du banc en 2014-15, en se sacrifiant et ce geste a débloqué l’équipe, a permis à Harrison [Barnes] de s’épanouir, a renforcé notre banc. Il a donné le ton par son altruisme et sa capacité à mettre l’équipe avant toute chose.” – Steve Kerr sur Andre Iguodala
On parle d’un All-Star dans son prime qui oublie son égo pour mettre en avant le collectif. L’exemplarité ultime pour ses coéquipiers, comme David Lee l’expliquait bien à son retour de blessure.
“Après qu’Andre ait connu la même chose cette année [perdre sa place de titulaire, ndlr], il serait très difficile pour moi de réagir différemment »
L’histoire ne pouvait pas être plus belle pour Iguodala. Lui, celui qui a accepté de perdre sa place dans le cinq, allait devenir le héros des Finales NBA 2015. Réintégré parmi les titulaires au Game 4, il allait permettre d’inverser le momentum dans ces finales. Son ajout en place d’Andrew Bogut permettait aux Dubs de faire dérailler Cleveland. Steve Kerr pouvait ainsi utiliser un group small ball capable de courir, défendre fort et shooter de tous les côtés, la version 2014-15 du fameux “cinq de la mort” des Warriors.
Important au scoring et à la création, Iggy fut aussi essentiel en défense face à un LeBron James isolé et forcé de beaucoup shooter. La récompense ultime était au bout : le titre NBA et le trophée de MVP des Finales pour un Andre Iguodala avec des stats certes moins flashy que Steph Curry mais qui incarne parfaitement la résilience et la mentalité d’un groupe qui s’est battu ensemble jusqu’au bout. Et pour parler de l’impact d’Iggy sur ses Finales, c’est finalement Draymond Green qui en parle le mieux.
« Nous nous tournons tous vers André quand les choses vont mal, c’est vers lui que nous nous tournons. Il a été formidable tout au long de la série. Il a sauvé la saison pour nous. C’est un professionnel. Cela s’est vu. C’est pour ça qu’il est le MVP. Et c’est pour cela que nous sommes champions ».
Si les Warriors ont remporté le titre en 2015, c’est qu’ils avaient de grands talents pour les mener mais aussi un groupe complet, profond, qui tirait dans la même direction sans se soucier de qui récupèrerait les lauriers. Un état d’esprit exemplaire symbolisé par ce slogan à jamais attaché à leur dynastie : Strength in numbers.
Source texte : Sports Illustrated, Golden State of Mind, CBS Sports