Des Wabash Outlaws aux Harlem Globetrotters, l’histoire du basketball afro-américain à Chicago

Le 06 août 2025 à 18:06 par David Carroz

Histoire du basketball afro-américain à Chicago - Des Wabash Outlaws aux Harlem Globetrotters, l'histoire du basketball afro-américain à Chicago
Source image : TrashTalk via ChatGPT

Lorsqu’on pense aux premiers rebonds de la balle orange chez les Afro-américains, c’est à Washington – grâce à Edwin B. Henderson – et à New York – de par ses nombreux Black Fives – que nos regards se portent. Parce que ces métropoles sont les principaux foyers de développement du basket-ball au sein de cette communauté ? Peut-être, mais aussi parce que ce sont sur les équipes liées à ces villes que l’on trouve le plus de documentation. Mais dans le Midwest, une ville a également beaucoup pesé, que ce soit en ce qui concerne les ballers mais aussi l’histoire au sens large de la communauté afro-américaine : Chicago.

Bienvenue sur les rives du Lac Michigan. Chi-town, une ville fondée par un Afro-américain justement, Jean Baptiste Point du Sable qui s’y installe en 1780. Mais aussi étape dans la vie de nombreux acteurs majeurs de cette communauté : Jesse Jackson, Fred Hampton, Barack Obama pour ne citer qu’eux. La ville dispose d’une histoire riche et différente de ses comparses de la côte Est.

Avant même que James Naismith ne sorte de son chapeau le basketball, la dynamique raciale à Chicago va avoir son impact sur la manière dont la balle orange va être adoptée par la communauté afro-américaine. De l’interdiction de “l’immigration nègre” inscrite dans la constitution de l’Illinois en 1848 à la première vague de la Grande Migration qui va faire gonfler la population afro-américaine à Chicago, en passant par la réforme de l’éducation en 1874 pour que l’école soit intégrée – chose très rare à cette époque, même pour les États du Nord ayant permis la fin de l’esclavage – la ville bouge, évolue. Tout comme son rayonnement auprès des Afro-américains, entre le point passage de l’underground railroad et l’appel du journal Chicago Defender à rejoindre les rives du Lac Michigan.

Forcément, dans une société encore gangrénée par la ségrégation – qui est présente également dans le Nord, même si elle se manifeste autrement que dans le Sud – l’arrivée de plus d’Afro-américains – de 1,5% de la population chicagoane en 1900 à 8,2% en 1940 – dans la ville crée des tensions et divise Chicago : Noirs d’un côté, Blancs de l’autre. Tous les pans de la vie sont impactés par cette séparation raciale – dont le triste héritage subsiste encore de nos jours –  plus ou moins perméable selon les périodes et les domaines. Le basketball n’y coupe pas.

Quand on évoque Chitown et la balle orange, les premières images qui viennent en tête sont logiquement celles des Bulls, avec en particulier un certain Michael Jordan qui a mis la franchise et la ville au sommet de ce sport dans les années quatre-vingt-dix. D’autres joueurs ont aussi exporté le basket-ball made in Chicago, comme Anthony Davis ou Derrick Rose, ainsi que Isiah Thomas si on remonte le temps. Mais la DeLorean empruntée aujourd’hui nous conduit bien plus loin, aux balbutiements même de notre sport chéri dans l’Illinois, de ses débuts jusqu’à la fin de la ségrégation en NBA. Une ouverture à laquelle Chicago prend part puisque parmi les trois pionniers qui débarquent en 1950 dans la Ligue, Nathaniel Clifton est fortement lié à la Windy City. Arrivé à Chicago jeune, il a aussi porté le maillot des Harlem Globetrotters. Une équipe qui, contrairement à ce que laisse penser son nom, est bien issue de Chicago.

Cette histoire du basketball afro-américain à Chicago, nous allons vous la raconter dans une série de sept articles présentant les équipes majeures qui ont sévi sur les rives du Lac Michigan à cette période :

  • Wabash Outlaws : l’avant garde du basketball afro-américain à Chicago
  • Roamer Girls : les filles de Chicago savent aussi jouer
  • Wendell Phillips High School : la forge du basketball afro-américain à Chicago
  • Du Eighth Regiment Five of Chicago au Giles American Legion Post Five : l’armée des ballers afro-américains de Chicago
  • Le Savoy Big Five, le Black Five la source des Harlem Globetrotters
  • Chocolate Co-Eds : les filles partent en tournée
  • Harlem Globetrotters : Harlem dans le nom, Chicago comme origine

Des équipes qui font leur trou dans leur coin. Car si Chicago offre plus d’opportunités que les États sudistes pour les Afro-américain, cela ne signifie pas que l’égalité y est de mise. Certes, le système Jim Crow ne règle pas la vie à Chicago, mais les relations sociales sont tout de même bien héritées des black codes, ces lois qui limitent les droits des Afro-américains. Qui se retrouvent cantonnés à des quartiers spécifiques, souvent surpeuplés et insalubres, comme la Black Belt de Chicago et en particulier South Side, en raison de pratiques discriminatoires en matière de logement.

Comme dans d’autres villes – dont Harlem – cette absence d’assimilation aboutit finalement à la création d’une culture alternative qui évolue en parallèle. Une société pour les Afro-américains, par les Afro-américains. Face à cette ségrégation, des quartiers comme Bronzeville (South Side) deviennent des centres de la culture noire, abritant des clubs de jazz, des théâtres et des entreprises appartenant à cette communauté. C’est ainsi que se structure, s’émancipe, la culture urbaine afro-américaine aux seins des différents clubs et centres sociaux. Et que dans ces différents regroupements, le sport se développe pour cette communauté. Que lentement mais sûrement le basketball trouve sa place.

Prêts pour le coup d’envoi de cette série non pas en sept matchs mais en sept articles ? Alors, asseyez-vous, ajustez votre bandeau et attachez vos sneakers, car nous allons remonter le temps. On se retrouve à Bronzeville, au début du vingtième siècle.


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