CARDSMANIA 2 : quand la passion des cartes devient mémoire collective

Le 02 oct. 2025 à 11:17 par David Carroz

Dans les cours de récréation des années 90, une règle non écrite faisait loi : « une brillante contre deux normales ». Ces échanges faisaient battre le cœur des collectionneurs en herbe. Plus que de simples morceaux de carton, ces cartes étaient un langage commun, une façon de partager une passion. Trente ans plus tard, Julien Chiron, auteur du livre auto-édité CARDSMANIA, veut faire revivre cette mémoire collective à travers un projet ambitieux qui complète ce premier opus : CARDSMANIA 2, « l’histoire de Panini en France dans les années 80 et 90 ».

Véritable passionné qui a plongé dans l’univers de la collection il y a 35 piges, Julien nous a accordé un peu de son temps pour évoquer avec lui cette flamme ainsi que ce nouveau projet d’écriture.

Souvenirs d’enfance

J’ai commencé à collectionner… les images Panini justement en 90 avec le fameux album 90 qui m’a vraiment bercé.

À douze ans, celui qui n’est pas encore connu comme “Rodman French Collector” ou “Kheir” plonge dans un univers où le basket – qu’il pratique – et les cartes se mêlent, même si les collections qu’il convoite ne sont pas toutes liées à la balle orange. Très vite, les simples pochettes achetées au tabac du coin ne suffisent plus. Avec ses amis, il part en expédition à Paris, à la recherche des boutiques spécialisées.

Les boutiques, je les ai fréquentées de plus en plus… au tout début 94 c’était vraiment une sortie touristique. J’en ai eu des souvenirs vraiment incroyables.

Ces souvenirs sont ceux d’une époque où l’on collectionnait pour le plaisir, où l’attente de découvrir une carte rare faisait vibrer autant que le match de Pro A du weekend sur FR3 ou qu’une rencontre NBA enregistrée sur une VHS par un pote dont les parents étaient abonnés à Canal+.

Si la NBA est désormais plus visible et s’est démocratisée, le marché des cartes a, lui aussi, bien évolué. Dans les années 90, Panini règne sur le monde des autocollants, jusqu’à ce qu’Upper Deck entre sur la scène européenne avec un coup de maître issu des USA : des cartes rigides qui supplantent rapidement les vignettes, une image plus moderne et en prime pour les fans de basket, un contrat d’exclusivité – qui court toujours – avec Michael Jordan.

 Plus personne n’achetait d’autocollants et tout le monde voulait des cartes. Tout le monde voulait des cartes de Jordan.

Le virage est pris, Panini vacille, et les cartes s’installent définitivement dans la culture des collectionneurs. Mais cette belle histoire a un revers : des années plus tard, l’esprit d’échange a disparu au profit de la spéculation.

L’échange aujourd’hui, ça n’existe quasiment plus. La valeur d’échange des cartes, ça n’existe plus. Plus personne ne la prend en compte. C’est directement de la vente, de l’achat.

Pour Julien, ce constat est à la fois amer et stimulant : il renforce l’urgence de transmettre ce qu’a été le hobby dans son essence, avant qu’il ne prenne ce chemin plus business et financier.

La genèse de CARDSMANIA 2

C’est précisément ce que veut accomplir CARDSMANIA 2 sur l’histoire de Panini en France dans les années 80 et 90. Le premier tome, publié en 2021, retrace l’histoire des cartes de basket en France entre 1991 et 2021. Mais Julien restait sur sa faim.

J’étais resté vraiment en peine par rapport au fait que je n’avais pas réussi à retrouver de salariés ayant travaillé en France pour Upper Deck.

Cette frustration est devenue une mission. Pour le deuxième tome, il est parti à la rencontre de ces témoins oubliés, anciens employés de Panini ou d’Upper Deck. Beaucoup n’avaient jamais parlé publiquement de cette période.

Jamais… parce que le monde de l’entreprise, quel qu’il soit, tu en parles à ta famille ou à tes amis, mais ça ne fait pas l’objet d’un film. Et là, ces gens étaient assez captivés et assez étonnés du fait que moi ça m’intéresse vraiment.

Ces témoignages, croisés, recoupés, donnent à l’ouvrage une profondeur nouvelle : il ne s’agit plus seulement de raconter des cartes, mais de révéler l’envers du décor, les histoires humaines et les choix stratégiques qui ont façonné ce marché.

Le travail n’a rien d’aisé. Les grands groupes ne s’ouvrent pas facilement, les témoignages doivent être vérifiés avec rigueur, et il faut toujours se méfier des contraintes juridiques liées à l’usage des noms de marque.

C’est tout le travail journalistique en fait : soit tu prends pour argent comptant un propos, soit tu le recoupes parce que tu te rends compte que rapidement il faut le recouper, c’est nécessaire pour s’assurer de la véracité du propos.

À cela s’ajoute la réalité de l’édition indépendante. Julien ne s’en cache pas :

En plus, moi évidemment je le dis, je le revendique, je ne suis pas professionnel du domaine.

C’est pourquoi il a choisi le financement participatif, seul moyen de faire exister un livre qui n’a pas vocation à entrer dans les circuits classiques. Comme pour CARDSMANIA 1, en 2021, c’est sur Ulule que vous pouvez trouver sa campagne.

Soutenir CARDSMANIA 2, c’est donc bien plus que contribuer à un projet de passionné. C’est préserver une mémoire collective, celle d’un hobby qui a bercé l’enfance de milliers de collectionneurs. C’est retourner 30 ans en arrière et se souvenir de ce sentiment d’excitation lorsqu’on claquait nos pièces de 5 francs chez le buraliste pour s’offrir une pochette. C’est donner de la valeur à des histoires que même les grandes marques n’ont pas jugées dignes d’être conservées, archivées ou racontées. C’est, enfin, retrouver l’esprit des cours de récré, où une carte brillante pouvait se négocier contre deux normales, mais où, surtout, on échangeait des sourires, des histoires et des rêves.

Julien le dit avec une émotion qu’on partage forcément avec lui :

C’est pour ça qu’un des sous-titres que je voulais mettre en avant, c’était une brillante contre deux normales.

Tout est là : un symbole simple qui raconte l’essence d’un hobby. Une époque où l’on ne parlait pas de valeur marchande, mais de joie d’échanger, de la surprise de découvrir une carte rare, du plaisir de partager une passion commune.

CARDSMANIA 2 ne se résume pas à un livre : c’est un morceau de mémoire collective, une passerelle entre générations, une façon de conserver vivante la magie de ces instants. Chaque page sera un rappel de ce que signifiait vraiment collectionner : créer du lien, transmettre une passion, faire circuler les histoires comme ces cartes qui passaient de main en main dans les cours d’école.

Et si cette mémoire peut continuer à s’écrire, c’est grâce à ceux qui, aujourd’hui, choisiront de l’accompagner.

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